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1/1: Bâti sur le roc, enraciné dans la foi
« La porte de la foi » (cf. Ac 14, 27) qui introduit à la vie de communion avec Dieu et permet l’entrée dans son Église est toujours ouverte pour nous. Il est possible de franchir ce seuil quand la Parole de Dieu est annoncée et que le cœur se laisse modeler par la grâce qui transforme. Traverser cette porte implique de s’engager sur ce chemin qui dure toute la vie. (…) A la lumière de tout ceci j’ai décidé de promulguer une Année de la foi. Elle commencera le 11 octobre 2012, lors du cinquantième anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II, et se terminera en la solennité de Notre Seigneur Jésus-Christ Roi de l’univers, le 24 novembre 2013. Le 11 octobre 2012, aura lieu aussi le vingtième anniversaire de la publication du Catéchisme de l’Église catholique, texte promulgué par mon Prédécesseur, le Bienheureux Pape Jean-Paul II, dans le but d’exposer à tous les fidèles la force et la beauté de la foi. Ce document, fruit authentique du Concile Vatican II, fut souhaité par le Synode extraordinaire des Évêques de 1985 comme instrument au service de la catéchèse et fut réalisé grâce à la collaboration de tout l’épiscopat de l’Église catholique. Et j’ai précisément convoqué l’Assemblée générale du Synode des Évêques, au mois d’octobre 2012, sur le thème de La nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi chrétienne. Ce sera une occasion propice pour introduire la structure ecclésiale tout entière à un temps de réflexion particulière et de redécouverte de la foi.
Extraits de la lettre apostolique Porta Fidei, promulguée par Benoit XVI le 11 octobre 2012
TEXTES RATTACHÉS À LA PREMIÈRE SÉANCE
[blockquote] Nous en avons particulièrement besoin à notre époque, où de nombreuses choses sur lesquelles nous nous appuyons pour construire notre vie, sur lesquelles nous sommes tentés de reporter notre espérance, se révèlent éphémères. L’avoir, le plaisir et le pouvoir se manifestent tôt ou tard incapables de réaliser les aspirations les plus profondes du cœur de l’homme. En effet, pour construire sa vie, celui-ci a besoin de fondements solides, qui demeurent même lorsque les certitudes humaines s’estompent. En réalité, puisque « pour toujours, ta parole, Seigneur, se dresse dans les cieux » et que la fidélité du Seigneur dure « d’âge en âge » (Ps 119,89-90), celui qui bâtit sur cette parole construit la maison de sa vie sur le roc (Mt 7, 24). Que notre cœur puisse dire tous les jours à Dieu : « Toi mon abri, mon bouclier, j’espère en ta parole » (Ps 119, 114) et, comme saint Pierre, que nous puissions agir tous les jours en nous en remettant au Seigneur Jésus : « sur ton ordre, je vais jeter les filets » (Lc 5, 5) ! [/blockquote]
[blockquote] Il est beau de noter que tout l’Ancien Testament se présente déjà à nous comme l’histoire dans laquelle Dieu communique sa Parole : « En effet, après avoir conclu une alliance avec Abraham (cf. Gn 15, 18) et, par Moïse, avec le peuple d’Israël (cf. Ex 24, 8), il se révéla au peuple qu’il s’était acquis, par des paroles et par des actions, comme le Dieu unique, vivant et vrai, de sorte qu’Israël fit l’expérience des voies de Dieu avec les hommes, qu’il en acquit une intelligence de jour en jour plus profonde et plus claire grâce à Dieu parlant lui-même par la bouche des prophètes, et qu’il manifesta toujours plus largement parmi les nations (cf. Ps 21, 28-29 ; 95, 1-3 ; Is 2, 1-4 ; Jr 3, 17) ». [/blockquote]
[blockquote] Cette complaisance de Dieu se réalise de manière indépassable au moment de l’incarnation du Verbe. La Parole éternelle qui s’exprime dans la création et qui se communique dans l’histoire du salut est devenue dans le Christ un homme, « né d’une femme» (Ga 4, 4). La Parole ne s’exprime plus ici d’abord à travers un discours, fait de concepts ou de règles. Ici, nous sommes mis face à la personne même de Jésus. Son histoire unique et singulière est la parole définitive que Dieu dit à l’humanité. D’où l’on comprend pourquoi « à l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive ». Le renouvellement de cette rencontre et de cette conscience génère dans le cœur des croyants la stupéfaction devant l’initiative divine que l’homme, avec ses facultés rationnelles et avec son imagination n’aurait jamais pu concevoir. Il s’agit d’une nouveauté incroyable et humainement inconcevable : « Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » (Jn 1, 14a). Ces expressions n’indiquent pas une figure rhétorique mais une expérience vécue ! [/blockquote]
Benoît XVI, Verbum Domini § 10-11 (2010)
COMPTE RENDU DE LA SOIRÉE (PAR JEAN SEN)
Pour construire sa vie, l’homme a besoin de fondements solides, qui demeurent même lorsque les certitudes s’estompent. Or bien des soutiens sur lesquels nous nous appuyons se révèlent éphémères. Benoît XVI nous avertit : « L’avoir, le plaisir et le pouvoir se manifestent tôt ou tard incapables de réaliser les aspirations les plus profondes du cœur de l’homme. » Pour porter des fruits et se développer, tout projet, toute vie ou tout futur doit commencer par trouver les expériences concrètes dans lesquelles des fondements solides, réfléchis et inaltérables peuvent s’enraciner.
Sur ce chemin, certaines réalités structurantes de la vie humaine apparaissent comme des moyens en vue d’un accomplissement plus grand. D’autres, à l’inverse, sont définies comme des buts à atteindre. Mais que ce soit dans l’un ou l’autre cas, les considérer uniquement à partir de soi et de son propre horizon, reviendrait à se priver d’une nouveauté incroyable et humainement inconcevable que l’homme ne peut atteindre par lui-même : « le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous. » (Jn 1,14a) Autrement dit, l’homme ne doit pas vivre selon sa propre mesure ni se définir comme l’unique bâtisseur de son existence, mais s’ouvrir à Celui qui donne à sa vie un nouvel horizon.
Être de relation et de don, l’homme porte en son cœur le désir très profond de communier personnellement avec quelqu’un. Désireux de se donner à une personne concrète et de la recevoir, l’homme est appelé à créer avec une personne particulière un lien réciproque d’amour qui soit total, unique, fidèle et fructueux. Le désir qui habite ainsi notre vie, nous porte finalement à l’extérieur de nous-mêmes, vers un au-delà dépassant largement les frontières de notre être.
[blockquote] L’amitié : fondement du don de soi et de l’accueil d’autrui [/blockquote]
Sur le chemin de la réponse à ce désir, l’amitié apparaît comme une première étape fondamentale. Structurant l’existence humaine, elle nous appelle à sortir de nous, à nous ouvrir au monde et à accueillir autrui tel qu’il est. Hôte permanent de ma demeure intérieure, l’ami est ainsi en moi comme une présence gratuite qui structure mon être et mes relations personnelles.
Ce très grand désir de communion, d’établir une relation amicale sincère et belle, et d’ouvrir son cœur à une présence extérieure fascine car elle a pour enjeu : la vie. Benoît XVI, dans son discours aux Bernardins en septembre 2008, rappelait justement qu’au milieu de la confusion de leur époque, « les moines désiraient la chose la plus importante : s’appliquer à trouver ce qui a de la valeur et demeure toujours, trouver la Vie elle-même. Ils étaient à la recherche de Dieu. Des choses secondaires, ils voulaient passer aux réalités essentielles, à ce qui, seul, est vraiment important et sûr. » Par le temps passé à se rendre présent à Dieu, par l’écoute attentive de la Parole, par l’élaboration d’un langage, ces moines parvenaient ainsi à avancer dans leur connaissance de Dieu. Leurs existences témoignaient finalement de la tension qui les habitait : « derrière le provisoire, ils cherchaient le définitif. »
En même temps, qu’elle permet d’établir une relation forte entre deux personnes et qu’elle structure profondément leur être, l’amitié est également source de frustration. Se révélant chaque fois un peu plus à moi, autrui dépasse pourtant continuellement la compréhension que j’en ai. Insaisissable, irréductible, l’ami demeure invariablement un mystère que je ne peux jamais circonscrire. Présente dans chaque relation amicale et a fortiori dans la relation amoureuse, cette frustration l’est également dans le rapport unissant l’homme à Dieu. Seulement, dans un cas comme dans l’autre, cette frustration est à vivre positivement car elle est la promesse d’un toujours et d’une richesse à accueillir. S’appuyant sur des gestes concrets, sur des temps passés et sur des expériences éprouvées ensemble, l’amitié est ainsi toujours portée vers l’avenir. A partir de cette histoire commune, l’amitié devient source d’une véritable confiance, d’une générosité profonde, et d’une joie réciproque sans que la quête d’un simple plaisir prône. Au regard de cette relation amicale unissant deux personnes, l’amitié à Dieu s’éclaire : sans cesser de s’approfondir, cette amitié s’enrichit continuellement de nouvelles expériences. S’appuyant sur elles, la relation à Dieu ne doit cependant jamais cesser de les écarter et continuer à avancer car s’y arrêter serait déjà la mettre en péril.