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« En ce temps, il n’y avait point de roi en Israël, chacun faisait ce qui lui semblait bon« .
Le livre des Juges raconte une période trouble et fragmentée de l’histoire d’Israël après la conquête de la Terre Promise et avant l’institution royale. Installées sur la terre d’Israël, les tribus se conforment très vite aux nations paiennes et à leurs idoles se rendant coupable d’infidélité. Ruinés, opprimés, violentés, le peuple d’Israël crie vers le Seigneur qui envoie 12 juges charismatiques pour mener bataille et le délivrer. Déborah, Gédéon, Samson, etc.. autant de figures mythiques qui nous éclairent sur l’histoire symbolique de ce livre.
Peinture : Artemisia Gentileschi, Yael et Sisera, 1620, Budapest
Enseignement sur le livre des Juges ///Père Alexis Leproux, Paul et Coralie de Rochebouët 28 novembre 2013
Après la mort de Moïse et de Josué, le livre des Juges raconte l’histoire des tribus d’Israël qui se fourvoient régulièrement en l’absence de roi. Au lieu de faire ce qui plaît au Seigneur, de rechercher l’unité du peuple, ils sont empêtrés dans des luttes violentes avec leurs voisins païens. Cela peut rejoindre notre expérience : quand nous refusons de nous appuyer sur le Seigneur et que nous démarrons nos journées sur nos propres forces, notre vie (personnelle, professionnelle, conjugale, religieuse…) est désunie. Mais le livre des juges montre aussi un événement salutaire : au cœur des vicissitudes, Dieu suscite des juges. Ils transmettent à Dieu le cri de vie du peuple. L’histoire de ce cri s’incarne dans des figures, marquantes et diversifiées, d’hommes et de femmes, qui incitent à relire le livre en terme de charismes.
1- Le cri de vie, petit éloge de la créativité
Les juges sont appelés, suscités par Dieu, dans un climat d’oppression. C’est l’exemple de Gédéon qui bat le blé au pressoir, par peur de Madiân (Jg 6,11). Du cœur de l’oppression jaillissent ces cris de vie, ces appels à la vie plus forte que la mort. Le livre des Juges est l’histoire du cri ontologique de chaque homme. Ce cri l’engage totalement en passant par sa chair, sa sensualité (trait souligné avec Samson), son affectivité, sa conjugalité, son intelligence et l’ensemble de ses facultés. Il intègre donc tout ce qu’est l’homme (y compris ses défauts, maladies ou faiblesses) et libère sa créativité, son génie personnel. Cette force de vie, cet appel, permet à chacun de connaître de l’intérieur les lieux qui -spécialement pour lui- sont vitaux, de les partager avec ses amis, son conjoint, sa famille, sa communauté…Le livre des Juges apprend donc l’art d’entendre sourdre sa vie comme suscitée par Dieu, avec réalisme. En effet, les chemins de traverse du livre sont comme une mise en garde contre une fascination de l’oppression. Aujourd’hui, l’oppression peut prendre le visage du chômage élevé qui obnubile un jeune diplômé sans travail. Il avait pensé être attendu par les employeurs et découvre que ce n’est pas le cas, il a probablement peu de moyens financiers, et des risques d’une dépression, d’un début d’alcoolisme sont réels. Il ne parvient plus à exprimer sa créativité. Davantage, au crédit d’une lecture réaliste, il faudrait ajouter le danger pour chacun de se réfugier dans une institutionnalisation. Faire son travail, passer ses vacances, organiser ses sorties comme l’imposent la culture ambiante ou celle de mon entreprise, jusqu’à un effacement maximal du « je » dans un tout assez impersonnel.
2- Charismes
Le livre des Juges invite donc chaque homme à découvrir ses charismes. A travers les portraits contrastés d’hommes et de femmes, le lecteur découvre différents charismes et des manières variées de les habiter. Si charisme veut dire don spirituel (notamment 1Co 12), nous avons vu le lien intime avec la corporéité (vie affective, sexuelle, psychologique…). L’anthropologie biblique met donc en exergue des complémentarités entre univers masculin et féminin qui s’aideront mutuellement, dans une expression créative, d’où naît la vie. Cette communion conjugale est image et ressemblance trinitaire. Fruit d’une nouvelle alliance, la vie transmise n’est pas l’histoire figée d’une communauté repliée sur elle-même (le premier juge Otniel est païen, Jg 1 ; Clovis païen se marie avec Clotilde chrétienne…), d’un groupe qui imiterait littéralement la génération précédente, mais une transmission de cette nouveauté.