17 avril 2024

Daniel

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LIVRE DE DANIEL/// DEVIENS CE QUE TU MANGES

Le prophète Daniel est un visionnaire. Comme Joseph avec Pharaon, Daniel entre au service du gouvernement pour interpréter les songes du roi Nabuchodonosor. Un langage symbolique passionnant qui traversent les âges de l’histoire des royaumes idolâtres et les signes des temps pour proclamer le triomphe du royaume des cieux.
 Citoyen du monde, citoyen des cieux, comment le peuple de Dieu habite le monde?

Enseignement sur le livre de Daniel

Père Alexis Leproux. 6 mars 2014.

Le livre de Daniel utilise un langage apocalyptique pour parler du sens de l’histoire : comment sont vécus les rapports entre juifs et païens, quelles perspectives se dégagent en faveur d’un engagement social et politique ? Le décryptage des images employées par le livre nous aidera à réfléchir sur ces questions toujours actuelles sur les rapports entre Eglise et Etat, entre foi et politique.

1-    Education

Le premier chapitre du livre présente l’eunuque du roi Nabuchodonosor (précepteur de l’époque) chargé de l’éducation de jeunes Juifs : Daniel, Ananias, Azarias, Misaël. Au nom de leur foi, ils refusent avec Daniel de manger comme des païens (Dn 1,11). Analogiquement, un chrétien est appelé à vivre dans le monde, à se construire dans la société comme lieu de liberté, mais doit apprendre à refuser certaines nourritures. C’est le sens du combat conduit par le cardinal Lustiger, en 1984, pour l’éducation chrétienne. L’Eglise invite parents et jeunes à habiter pleinement la société. En ce sens, elle se méfie des initiatives qui consisteraient en une éducation autarcique. Surtout, elle apprend à vivre dans le monde en se ressourçant en Dieu : en refusant la société de consommation et l’instrumentalisation du corps humain (comme objet ou sujet). Apprendre à se construire ainsi est un choix spirituel qui renforce, enrichit le fidèle grâce à l’art du discernement. Son positionnement à l’encontre de certaines valeurs de la société ne l’affaiblit pas mais l’enrichit, pour discerner dans son histoire ce qui le conduit à la vie.

2-    L’art du discernement

Le livre de Daniel montre trois écueils qu’il doit apprendre à éviter : l’idolâtrie du politique, l’orgueil, l’abandon du culte. Premièrement, c’est l’or de la statue (Dn 3,1sv.) qui symbolise l’idolâtrie de Nabuchodonosor qui consiste à croire que la politique fait la vérité du monde. Cette immanence de la vérité exclut déjà un sens de l’Histoire, de nos histoires révélé par la vérité de Dieu. Deuxièmement, l’orgueil du roi Balthazar (Dn 5,9sv.) en l’action politique comme promesse de résoudre des problèmes irrésolus. Nous savons qu’un pouvoir étatique même puissant ne peut prétendre remplacer le vrai moteur de l’histoire qui est l’engagement personnel de nos vies, la générosité des citoyens. Troisièmement, Antiochus IV (Dn 11) en supprimant le lieu de Dieu cherche à déraciner l’âme religieuse. Mettre Zeus dans le Temple participe de l’abomination de la désolation. Aujourd’hui cela se traduit dans l’impossibilité pour certains médecins d’être objecteurs de conscience, alors qu’ils considèrent que l’avortement est un crime.

3-    Quelques conséquences pour construire la société

Des trois points de discernement, nous déduisons que le chrétien doit protéger la place de Dieu dans l’univers. Cela revient à mettre en œuvre la charité, qui ne relève pas de nos propres forces. Deuxièmement, la logique de la vie doit être humilité dans l’exercice du pouvoir, dans l’éducation. Ainsi, la foi nous pousse à reconnaître en vérité ce que nous sommes face aux autres. Troisièmement, le chrétien est appelé à servir la vie. Tout homme a été créé dans le Christ (Col 1,15) donc toute vie humaine est plus forte que des systèmes ou pouvoir qui l’oppriment. Cette dignité est celle de toute personne. Le chrétien n’est pas communautariste, au service de la vie des seuls chrétiens. Il est au service dans son pays : un seul homme au cœur droit et généreux est une espérance et une assurance qu’un pays change. En annonçant l’Evangile, il est au service de la toute liberté –y compris religieuse- de chaque homme. Annoncer n’est pas convertir les hommes ; c’est préparer le terrain à Jésus qui seul convertit les cœurs. Il est le « chemin, la vérité et la vie » (14, ­6), que l’Eglise imite, sert, communique, en étant éclairée par le Christ. Son Esprit soufflant où il veut (Jn 3,8), des hommes rencontrent le Christ et adorent en esprit et en vérité (Jn 4,23-24), en dehors de l’Eglise visible. Davantage, il y a des semences de vérité chez les non-chrétiens, qui parfois ne sont pas contre nous mais pour nous (Mc 9,40). Ce service de la liberté religieuse n’est pas un relativisme car il est animé de l’espérance que dans la gloire nous parvenions à la vérité tout entière.  Dans l’attente de la Parousie, nous sommes exhortés par celui qui nous pose la question : « le Fils de l’homme trouvera-t-il la foi sur terre à son retour » (Lc 18,18), le même qui loue la Cananéenne, car il n’avait pas trouvé une telle foi en Israël (Lc 7,9).